vendredi 2 mai 2008

Lettre ouverte

Mardi 2 mai 1989 – 6h30

Lettre ouverte aux cons de la terre,
Aux cocus de tous poils,
Aux hommes...

Malheureusement , c'est vrai : je n'avais jamais vécu dans la perversion, j'en ignorais la réalité. Et voilà que je la découvre au quotidien, en dehors des gros titres de la presse à grand tirage, sous le masque anodin des relations extraconjugales : de l'homme qui partageait ma vie d'abord, de tous les autres ensuite...sans transition ni signal d'alarme. Je perds mon optimisme, mon équilibre et cette hygiène de vie dont j'avais rêvé l'inébranlable complicité : je rencontre la solitude. Mes fantasmes se font plus pressants, mon enfant grandit et la jeunesse des autres m'éclabousse de stérilité.

Qu'on ne me demande pas l'impossible ! Je ne retournerai jamais au lit douillet de l'innocence. L'essentiel est de ne rien savoir, la politique de l'autruche devient le clef du bonheur... Je ne réponds plus aux questions, il ne me trompe plus : je suis sensée ne rien savoir et ne risque plus la déception : j'ai déjà donné ; aujourd'hui, je décide .

D'autres prennent des maîtresses pour conserver, jaloux, l'amour de leurs épouses ; je prendrai un mari pour découvrir l'amour dans les bras d'un amant.

Et cet amant (existe- t'il ?) qui donne à mon corps cette douceur des folles passions extra temporelles, je me le garde au chaud d'un lit dont les profondeurs rejettent la pestilence de vos nuits et de votre imbécile ignorance.

Dans l'attente, mes amours, Messieurs, sont portes ouvertes et mon cul ne regarde personne : son esprit est ailleurs...
Fait chez moi, un jour comme ça ....

Sabine

Douceur de l'âge

Sous le vieux toit, paille d'oiseau,
Dans le duvet de notre amour,
Veille une bercée d'enfants chéries :
Tes années chantent de chaleur .
La même bougie posée sur ton cœur,
La même flamme au grand jour,
Tremble, toujours offerte .
Comme l'espace, porte ouverte,
Le temps chaque jour est nouveau ..
Je t'aime à l'infini .

Ton regard flambe dans mes yeux,
Ta peau se dessine sur ma joue,
Ton sourire ouvre ma bouche,
Et tes mains recouvrent mes poings...
Ton âge répond du mien,
Comme l'histoire répond de nous .
Que notre différence première
Conduise nos pas en ce monde jusqu'à cet accord silencieux
Qui fleurira notre couche .

Je m'éternise de ta jeunesse :
Renaissance de ma folie
Lestée de l'ombre trop pesante .
Car l'insolence est notre temps,
Là où se recherche l'instant
De l'image réfléchie .
La souillure de l'immaculée
Est une fille voilée,
Un germe de sagesse,
Une quête patiente .

Je te promène sur un fil,
Mais ne crains pas de tomber :
Fantôme de l'avenir
Tu sauras marcher droit .
L'océan s'apaise devant toi
Qui porte son éternité .
Les rides de son étendue
Sont tes promesses d'absolu .
Tu as su rejoindre cette île
Où je vivais d'un souvenir .

Sabine

Lettre Ouverte (par nécessité ) à ma fille...

Petite Alice,
C'est ta mère qui te parle (moi)
Je veux te mettre en garde
Pour l'Amour , l'Amour de toi.
Tu n'auras dans la vie , qu'une seule attente,
Qu'un seul Amour,
Le même que ta mère.
(je vois sourire tonton Sigmund , le con ! )
Et cet Absolu , une fois seulement
Tu l'auras rencontré,
En un coin unique de la Terre:
Ne le manque pas,
Car lui seul saura te combler,
Lui seul sera , pour toi,
Toujours fidèle à lui- même.
Il portera , au fond de son regard,
Ton espérance la plus intime,
L'orgasme de ta métamorphose
De femme.
Chaque trait de son visage
Te sera sourire.
Il n'attendra de toi
Que ta beauté:
Ne lui donne rien de plus
Si ce n'est toi-même...
A lui seul , tu entends,
Tu pourras tout confier,
Tout prendre jusqu'au reprendre,
Tout donner jusqu'au pardon,
Tout faire jusqu'au parfaire.
Lui seul t'espère , lui seul est clef.
Consolation unique
De ton infirmité congénitale.
Son seul reproche sera
Son existence,
Contante , exclusive,
Que tu n'entendras pas.
Les replis secrets de sa peau
Te seront vagabondages familiers,
Ivresse de l'apparence
Vacarme de l'Eternité
Silence de l'Ephémère.
Impalpable , inviolable,
Il te sera caresse.
Il t'aimera comme je t'aime,
Plus encore.
Reflet unique,
Ne le cherche pas ailleurs
Que dans la superficie glacée
De ton Miroir.....

Sabine (Dimanche 3 Novembre 1985)

Écrire....

Écrire....
Pas de cette écriture là qui se signe ou se soigne. Écrire simplement parce que les mots se suivent et nous ressemblent. Il n'y a rien à comprendre, aucun message. Des mots seulement, comme je les aime, comme j'aime la vie, sans intérêt, sans avenir. Parce que le plaisir traverse le corps et remonte jusqu'à la main qui sait. Maintenant.

Écrire...

Ne laisser entre les lignes aucune place qui ne soit déjà mienne. Je prends tout.

Donner, c'est prendre encore.

Écrire...

Pour oublier les mots qui brûlent des lèvres que le silence assèche. Je parle trop pour dire vraiment. D'ailleurs, une vie ne me suffirait plus. Et je n'ai rien à dire.

Ces lèvres, asséchées et brûlées, baisent les lèvres et la peau mieux qu'elles ne parlent. Je rêve d'écrire le chemin que mes lèvres et mes mains auront tracé sur ta peau.

Écrire...

Oser le mot de trop.

Pas encore.

Pas déjà.

L'éternité reste le privilège des mots: Ce mot, si mot il y a, saura trouver sa place le jour venu, si le jour vient. Il est, il viendra, c'est écrit. C'est déjà trop.

Les mots sont là qui se bousculent et me pressent, mais je n'ose pas: dialectique du maître et de l'esclave, qui suis-je ? Trop de pudeur et d'orgueil sans doute.

Le jeu n'est pas si facile. Les mots ne se lient pas. La règle n'est pas écrite.

Ecrire...

Souffler les mots sur un frisson naissant. Et puis, si je rougis d'ici, tu ne le sauras pas, comme tu ne sauras pas si je ne rougis pas.

mardi 9 mai 2000, 22h33

Jeux

Je n'ai pas rêvé...
Il m'a frappée d'abord
Parce qu'il le fallait
Et j'ai pris plaisir à poser mon corps
Sur ses genoux.
Puis il m'a embrassée.
Il a dégagé mon manteau
Et passé la main sous mon pull.
Il m'a caressée
Et j'ai frémi.
Il a pincé le bout de mon sein
Et j'ai aimé ça.
Mais je n'ai pas rêvé...
Il m'a embrassée
Frappée et pincée.
Et je n'ai qu'une envie
Recommencer.
Rien n'est sage
Et tout est jeu.
La vie se doit
De jouer l'amour
Plus qu'il ne se fait.

Mes mains

mercredi 29 mars 2000

Mes mains sont savantes
Et le savent
Elles échappent parfois
A mon emprise
Et font ce que je n'aurais jamais fait
Elles osent d'impossibles voyages
Elles se resserrent
Lorsque je tends les bras
Et s'ouvrent grand
Quand je voudrais serrer les poings
Elles ont l'art des caresses
Et je m'amuse
Des frissons qu'elles génèrent
Lorsque du bout des doigts
Elles se promènent sur des terres
Où mes lèvres tentent en vain
De les suivre
Mes mains m'échappent et vivent
Ce que mes rêves
Ont imaginé
De généreux élans
De profondes entailles
En l'âme qui m'honore
Je les regarde prendre
Ce qui m'est offert
Et je ferme les yeux
Pour mieux les laisser faire...

Sabine

De ce amour là

De ce amour là, je vis

Sans illusion, éphémère, je le veux aussi sans limite.

Qu'est-ce que c'est bon, mon Dieu! Qu'est-ce que c'est bon de vivre!

Que tout s'arrête aujourd'hui, je saurai au moins que j'ai vécu...

Je ne saurai jamais me contenter des amours ordinaires qui donnent la paix: je suis du printemps. Je suis de celles qui ne peuvent donner à moitié. Aller jusqu'au bout de tout et n'avoir aucun regret. Il nous reste trop peu de temps chaque jour, chaque jour je veux renaître.

"La Moldau" Smetana

Toile

Au fil du temps,
Au fil de toi,
Je tisse ma vie
Comme une toile
Filante...
Me prendre au jeu
Des mots interdits
Et me débattre aussi
Pour mieux renoncer.
Laisser courir la soie
A fleur de peau
Et frémir, tressaillir
A la morsure du coup
Attendu.
Aux confins de la douleur,
Le plaisir d'étreindre
La lumière... et l'éclat
De la puissance.
Au fil des nuits
Je tisse ma vie
Comme un ruban
De cuir.
L'empreinte sur mon corps
Est un calice
Où je te donne à boire
Le vin rouge de plaisir,
Le nectar du désir,
Le sirop de fruits mûrs
Gorgés de sucre.
Et je goûte à tes lèvres
L'amour jusqu'à l'ivresse.

2001

LES CHÈVRES

Il voulait des filles,
Rien que des filles.
Il en avait.
Pour pas cher :
Au marché des hommes
Les filles sont données.
Il en avait même beaucoup.
Mais le pauvre, le malheureux
( et tout, et tout )
Il les perdait toutes !
Elles voulaient voir la ville
Et bouffaient du maquereau
Dans l'obscurité
Des chambres fermées.
Faut croire qu'elles sont vraiment
Toutes
Comme ça.
Elles partaient, quittaient
Travail, patrie, famille
Et le loup les mangeait...
( même les vieilles et les boudins,
j'ai jamais compris ! )
Alors un jour,
Il en pris une toute jeune,
Pour l'éduquer.
Les filles, si on veut qu'elles deviennent
Les madames à monsieur,
Faut les éduquer.
Au début, ça marchait pas trop mal :
Encore pas trop salope, la gamine.
Elle faisait la vaisselle, la cuisine,
Elle lavait même les slips, c'est tout dire !
Un jour pourtant...
Un con est venu lui dire
( fallait bien que ça arrive,
encore un "pas- de- chez-nous " )
Qu'elle avait de beaux yeux,
Tu sais .
D'abord, elle n'a pas compris :
Ses yeux, ses yeux... bof !
Après, elle a vu
Les grandes dents,
Les grandes oreilles,
Les grosses paluches,
Et toutes ces choses.
Et ils sont partis,
Main dans la patte,
Et le loup l'a mangée
Et nananinanère !
N'empêche, c'est pas en dévorant les chèvres
Que les hommes feront des loups-garous .

Sabine

DES MOTS...

Des mots
Qui soudain s'envolent
Des mots d'amour
Des mots de haine
Des mots d'amour et de haine
Qui s'envolent
Et donnent la vie
Qui s'échappent
D'où tu n'es plus
Des mots pour personne
Ceux que je dis
Sans les entendre
Ceux que je souffle en vain
Que je souffle en tempête
Des mots perdus
Des écrits
Des mots toujours
Qui donnent la vie
Et se paient de rêves
Des mots impuissants
Qui soulagent
Et me perdent...
Des mots
Sans toit, sans ailes

Des mots s'abîment
Des morsures
Des mots qui me restent
Des mots de haine
Des mots de dégoût
Des mots
De passion ravalée
Des mots sans amour
Des jeux de mots
Sans plaisir
Démolis...
Des mots
Graphiques
Qui donnent la vie
Des mots d'adieu
Sans chagrin
Pour demain
Des mots
Silencieux....

Sabine

Ça ne veut rien dire

1983

Méfiez-vous! Méfiez-vous !
Croyez-moi ! Faîtes attention !
Ça ne veut rien dire...
Ce n'est pas parce qu'
On vous passe les bras autour du cou
Que vous êtes quelqu'un.
C'est peut-être tout simplement
Que l'on est fatigué de se porter
Tout seul.
Ça ne veut rien dire...
Ce n'est pas parce qu'
On vous prend la main
Que vous avez de beaux yeux.
C'est peut-être tout simplement
Que l'on pense à autre chose
Ça ne veut rien dire...
Ce n'est pas parce qu'
On vous embrasse
Et qu'on vous parle d'amour
Que l'on parle de vous
C'est peut-être tout simplement
Que...

Et puis de toute façon,
Même si c'était ça
Même si vous avez confiance
Que vous êtes parti
Qu'on ne reviendra plus
Ça ne veut rien dire,
C'est le destin, n'est-ce pas ,
Faut pas dramatiser...

MORALITÉ: Il n'y a que ceux qui se taisent
Qui ne veulent rien dire...

Sabine

Slimak texte


Laurence est mon deuxième prénom. Nous cachions nos amours...

Slimak image

Pile ou face

Pile ou face?

Coté pile, putain, plaisir, je gagne.

Coté face, fadeur, fini, je gagne encore.

Quelle image animée s'agite en moi? Pile ou face,

Il n'y a aucun masque au carnaval de mes jours,

Ni façade, ni détour. Juste un recto-verso ordinaire.

L'instant se joue de moi: pile, j'ai perdu; face, je perds encore,

dans l'ivresse de la fête charnelle des plaisirs qui se perdent aussi.

Sabine, jeudi 11 mai 2000, 7h51

Marginale (Pourquoi pas ?)

Il fallait le dire
C'est fait:
Je suis une marginale.
Mes valeurs ne sont pas les bonnes
Ma cohérence n'est qu'à moi.
En choisissant de vivre aujourd'hui,
Sans vivre pour demain,
J'ai mis les pieds dans leur plat :
Ça leur a coupé l'appétit
Et moi
Le fil de mes idées...
Où en étais-je ?
Qu'importe, j'en suis là.
Mais je ne suis pas dedans.
Allez comprendre quelque chose, vous !
Pourquoi s'obstine-t-on
À vouloir me mettre quelque part,
Et, en particulier,
Où je ne veux pas être ?
Faut le faire
Et ce n'est pas encore fait...
Chacun va où il peut,
C'est bien connu,
Mais il y a pouvoir
Et devoir.
Les choses sont compliquées.
Où plutôt, elles ne sont rien
Que ce qu'on en fait.
Les gens, pas vous, les cons,
S'inventent des choses
Qui les font eux
Et non l'inverse.
Les gens me font des choses,
Quand je ne demande rien,
Et viennent ensuite me reprocher
De ne pas les avoir faites moi-même.
(Les mauvaises, les bonnes
Ils se les gardent)
Je les emmerde, moi,
Les choses, et les gens
Avec.
Laissez-moi dormir ma vie....

5/12/1985

Appel (Marginale)

Un pied devant l'autre
Et doucement
Je ne marche pas droit pourtant :
Je sursaute.
D'où vient le mal apprivoisé
Dont l'homme est la victime déclarée ?
D'où vient ce dernier espoir
Échappatoire ?
D'autres vont comme moi,
Trébuchent et recommencent.
Et le chemin de l'ignorance
Les ramène au bon droit.

Tombée cent fois déjà,
Je piétine en silence.
Je meurs d'absence
Dans ses bras...
Où chercher le fabuleux trésor
Que promettent les fous ?
J'en reviens au décor
De tout.
Impuissance de l'homme
À communiquer l'amour,
Nous sommes en ultimatum
Toujours.

La victoire est un nom
Celui de notre histoire,
Pour l'imparfait de l'assommoir
En bourdon.
Qui trop file le temps
Tisse son filet
Et tombe dans l'instant,
Satisfait.
Je veux rester debout
Dans l'espace vivant
Comme un trépas latent,
Sans rendez-vous.

Je bas une mesure morte,
D'un geste vague, long
Le bateau qui me porte
Est sans fond.
Qui reviendra me dire comment
Il a pu repartir
Dans le mystère apparent
Du devenir ?
Le procès à huis clos
De l'existence est ouvert.
Rendez-moi le repos
De l'univers....

1985